jeudi, mars 16, 2006

Le dilemme du journaliste étudiant, épisode 2

JE N'AI PAS POUR HABITUDE de raconter ma vie sur ce blog. Une petite entorse toutefois, que je vais commettre au nom du bon sens journalistique. Voire de la déontologie.
Aujourd'hui, branle-bas de combat chez certains de mes "confrères". Le sujet du jour : la mobilisation nationale contre le CPE (contrat première embauche). Une partie de mes camarades souhaite aller manifester aux côtés des étudiants et lycéens, à Lille. Après tout, ils sont, pour le moment, étudiants en journalisme. Légitime, donc, qu'ils décident de prendre position, individuellement.
Défiler au nom de ses convictions personnelles ne me pose aucun problème. Sauf que là, le groupe d'anti-CPE a décidé de se rassembler, sans vote préalable, sous une bannière commune, au nom de l'Ecole. Donc de ceux qui ont décidé de ne pas manifester.
Pendant que ceux-ci s'affairent à confectionner leur banderole à coups de bombes -non lacrymo-, d'autres décident de couvrir la manifestation lilloise en télé, agence ou radio.
J'ai donc été dépêchée pour couvrir l'événement en tant qu'agencière. En arrivant sur les lieux de la manif, je suis frappée par la jeunesse du cortège (moyenne d'âge, 17 ans) et par le nombre étonnamment disproportionné de journalistes pour couvrir l'événement.
Premier bain de confrères : les journalistes se pressent. M6, Paris-Match, France 3 sont là. Un intervenant à l'Ecole me prend sous son aile, me conseillant de me placer en tête de cortège pour éviter les débordements. Outre ces professionnels, d'autres étudiants de l'Ecole sont là. Comment alors expliquer qu'il y ait autant d'étudiants de l'Ecole qui manifestent que ceux qui couvrent l'événement ?
Lira-t-on, demain, dans la presse, que l'Ecole s'est dédoublée ? Je ne sais pas comment expliquer aux personnes extérieures que certains de ces apprentis journalistes se sont sentis plus journalistes qu'étudiants, tandis que d'autres ont privilégié leur statut d'étudiants. Au risque d'oublier qu'ils seront journalistes dans un peu plus d'un an.
Et quand le cortège de futurs journalistes hue la petite dizaine de leurs collègues qui couvrent l'événement pour un exercice d'école, je reste dépitée qu'on nous reproche de vouloir faire notre travail.

6 Comments:

At 6:19 PM, Anonymous Anonyme said...

salut Aurélie

Etant en grande partie à l'origine de la banderole de jeudi je me fais un devoir de te répondre.

Je veux tout dabord rappeler que la veille de la manifestation j'ai fait le tour de tous les groupes pour demander qui voulait voter pour mettre le nom de l'esj sur la banderole.

Personne ne m'a dit oui. Ce n'est qu'une heure avant la manif, le lendemain, que certaines personnes se sont avérées contre.

Deuxième point. Je ne sais pas si tu as déjà manifesté, mais il se trouve qu'une banderole n'engage pas toute l'école, à partir du moment où le logo de l'esj n'est pas dessiné. Seuls les étudiants qui sont là (à savoir une majorité de la promo) sont impliqués. D'autant plus que même si nous avions organisé un vote, il n'aurait pas été représentatif puisque, les deuxième année étant en stage, la moitié de l'école n'aurait pas participé.

Une petite question. Crois tu qu'à l'IEP par exemple tout le monde soit contre le CPE ?

Voilà je tenais juste à rappeler les faits tels qu'ils s'étaient déroulés, exigeance d'une "étudiante" en journalisme oblige.

En tous cas si la semaine prochaine la mobilisation nationale continue il est certain que nous organiserons un vote pour la banderole, comme nous l'aurions fait si vous vous êtiez manifesté avant jeudi.

Ta collègue,
Marie Dupin.

 
At 7:59 PM, Anonymous Anonyme said...

salut Aurélie

Etant en grande partie à l'origine de la banderole de jeudi je me fais un devoir de te répondre.

Je veux tout dabord rappeler que la veille de la manifestation j'ai fait le tour de tous les groupes pour demander qui voulait voter pour mettre le nom de l'esj sur la banderole.

Personne ne m'a dit oui. Ce n'est qu'une heure avant la manif, le lendemain, que certaines personnes se sont avérées contre.

Deuxième point. Je ne sais pas si tu as déjà manifesté, mais il se trouve qu'une banderole n'engage pas toute l'école, à partir du moment où le logo de l'esj n'est pas dessiné. Seuls les étudiants qui sont là (à savoir une majorité de la promo) sont impliqués. D'autant plus que même si nous avions organisé un vote, il n'aurait pas été représentatif puisque, les deuxième année étant en stage, la moitié de l'école n'aurait pas participé.

Une petite question. Crois tu qu'à l'IEP par exemple tout le monde soit contre le CPE ?

Voilà je tenais juste à rappeler les faits tels qu'ils s'étaient déroulés, exigeance d'une "étudiante" en journalisme oblige.

En tous cas si la semaine prochaine la mobilisation nationale continue il est certain que nous organiserons un vote pour la banderole, comme nous l'aurions fait si vous vous êtiez manifesté avant jeudi.

Ta collègue,
Marie Dupin.

 
At 1:51 AM, Blogger Aurélie said...

L'objet de mon post était simplement de poser une question à mon avis clé de notre formation : on est à la fois étudiants et futurs journalistes (du moins, c'est ce que tous les intervenants nous rappellent chaque jour). Je m'étonne juste que des étudiants de la même école couvrent et participent à la fois à la manif ! Comment les gens extérieurs à ça peuvent-ils s'y retrouver ?

Et puis, peut-être faut-il le rappeler, ceux -dont je fais partie- qui n'ont pas manifesté contre le CPE ne sont PAS FORCEMENT POUR le CPE... Personnellement, je n'ai pas manifesté parce que la question a été d'emblée politisée par les différents bords politiques de notre pays. A mon sens, le CPE n'est qu'un exemple des dérives qui structurent le marché du travail sur lequel on va se retrouver l'an prochain. Pourquoi n'y a-t-il pas eu pareille mobilisation au sujet des stages ?

Concernant la banderole, je m'interroge sur la décision de ne pas faire de vote (il devait y avoir une AG) là-dessus. Cela étant, je ne pense pas que la réputation de l'Ecole et celle des non-manifestants en soit pour autant noircie, salie. Simplement, il n'y a pas eu de place laissée au débat : on aurait dû tous en discuter sans préjuger que tout le monde dans les deux promos (+ les autres filières) pense la même chose. Et non, il n'y a pas de pensée unique à l'Ecole, et heureusement !

Voilà. Ben sinon, juste pour l'info, ne t'inquiète pas, j'ai déjà manifesté. Et ma formation à l'IEP n'a rien à voir là-dedans...

Aurélie

 
At 11:51 AM, Blogger Panajachel said...

salut borisette!

déjà, félicitacions pour ton blog qui s'étoffe de semaines en semaines.
Concernant la manif anti-CPE, je pense qu'il fait dissocier ceux qui couvrent la manif de ceux qui sont purement militants en effet.
Je ne suis par contre pas persuadée que mettre le nom de l'école sur une banderole engage l'école dans son ensemble. C'est normal qu'il n'y ait pas de position univoque et que l'école ne prenne pas position en tant que telle, cela tuerait le débat! Mais que les étudiants contre le CPE se revendiquent d'une école, pourquoi pas? Sciences-Po a fait pareil. ds la manif de jeudi, tu pouvais voir une petite délégation de sciences po avec sa banderole...ils ne représentaient bien sûr pas tous les étudiants de l'école.
manifester ou couvrir, il faut choisir!
Enfin cela mérite un petit débat interne des esj-iens...

moi ce que j'en dis, c'est vraiemnt terrible, on voit bien que ce qui pose problème, ce n'est pas le CPE, ou alors les jeunes sont vraiment mal informés! quand on sait que pour un CDI, il y a une période d'essai de 6 mois renouvelable un an, avec possibilité de se faire virer du jour au lendemain sans assurances chômage, donc bien pire que le CPE!
Le CPE n'est qu'une excuse, qu'un prétexte pour condamner un société qui va mal, un système universitaire qui forme des jeunes à l'aveuglette sans perspective de boulot au final. C'est surtout une vraie crise de confiance chez les jeunes qui ne savent pas pourquoi ils manifestent, ils savent juste que ça va mal, qu'ils n'ont pas de perspectives, qu'ils sont sacrifiés, mais ils se trompent de combat, ce n'est pas celui du CPE. C'est celui de l'exclusion, du manque de moyens dans les universités, de l'inadaptation des formations.
Alors oui, il faut se faire entendre, c'est sûr, le gouvernement doit écdouter les jeunes, il ne l'a pas fait en essayant de faire passer son CPE à la va vite sans discussions, en faisant un vrai travail pédagogique avec des chefs d'entreprises de PME. Il ne récolte maintenant que les fruits de son intolérance.
La mesure, en soit, n'est pas mauvaise, c'est la manière de l'imposer qui est intolérable.
voilà les réflexions d'une apprenti-journaliste parisienne...

biz de paris

 
At 11:52 PM, Anonymous Anonyme said...

Les journalistes ne se nourrissent pas de nectar et d'ambroisie. Nous serons avant tout des salariés. Alors rien ne nous empêche de nous mobiliser en tant que futurs précaires sur le marché du travail. La prudence déontologique ne doit pas servir d'excuse au défaut de convictions.
Strasbourg gagnera l'an prochain la coupe de France. C'est ma mamie qui me l'a dit. Au passage.

Antoine

 
At 4:32 PM, Blogger Kispasse said...

ON A GAGNE, ON A GAGNE! La lutte a payé, le CPE trépassé. Merci à ceux qui ont participé à ce grand mouvement de la gauche contre un projet qui permettait aux patrons de jeter les jeunes comme de la marchandise, sans motiver leur décision.
Pour ce qui est des votes, il y en a eu dans le grand amphi de l'ESJ, je vois pas trop de quoi tu parles.
Pour ce qui est de la réserve journalistique: quand t'y vas comme journaliste, tu dois faire preuve de réserve. Mais j'y suis allé comme MANIFESTANT contre le CPE, pas en tant que journaliste.
Avec ton droit de réserve, tu t'accordes quand même le droit de voter, j'espère! Parce qu'avec de tels raisonnements, un bon journaliste neutre serait bien incapable de choisir un candidat!
Enfin, pour ce qui est des stages, la question a été mise sur le tapis et dans la loi sur l'égalité des chances, il y a obligation pour les patrons de rémunérer les stagiaires de longue durée (300 euros par mois minimum, je crois, c'est pas beaucoup mais c'est mieux que rien). Comme quoi, tout n'était pas à jeter dans cette loi. Le CPE l'était définitivement.

 

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